samedi 7 mai 2011

Manifestation contre le parti islamique Ennahda à Tunis

Aujourd'hui le 7 mai 2011 à 13h de nombreux manifestants se sont réunis devant le Palais des Congrés de l'avenue Mohammed V pour montrer leur refus de la participation éventuelle du parti à tendance islamique Ennahda pour les élections présidentielles à venir. Rappelons que le leader du parti Ennahda, Rached Ghannouchi, déclare ouvertement s'inspirer du fondateur des Frères Musulmans, Hassan el-Banna, et des idées très controversées de Sayyd Qutb, ancien membre des frères musulmans, dont les oeuvres encouragent la naissance d'états islamiques dont la juridiction viserait à suivre à la lettre le Coran. Rached Ghannouchi est  revenu sur sa propre déclaration selon laquelle il ne se présenterait pas aux élections, et ce n'est ni la première fois (sous Ben Ali il était revenu sur un pacte signé entre son parti et le gouvernement) ni la dernière fois que cet ancien exilé, qui quitta le pays en 1991 à l'aide d'un passeport soudanais, tourne bride sans se justifier.
Ces jeunes tunisiens, qui ont réussi à se réunir en nombre en ces temps tumultueux, disent être conscients de risquer leur vie aujourd'hui pour faire entendre la voix de la raison. Ils sont nombreux à s'être fait menacer de mort sur les réseaux en ligne. Les organisateurs de cette marche, qui ne se disent appartenir à aucun parti (d'autant plus que l'existence officielle de partis est une chose nouvelle en Tunisie) et qui se proclament indépendants, ont vu leur compte en ligne volé par des personnes qui ne souhaitaient pas que cette manifestation ait lieu. Et nombreux sont ceux qui se sont opposés à ce que cet évènement voie le jour dans cette nouvelle Tunisie qui se veut pourtant libre, libre également et surtout en souvenir du sang versé des  manifestants morts lors de la récente Révolution de Jasmin.



Sur le site de réseau en ligne plus de 10.000 personnes estimaient venir. Les risques qu'engagent une telle manifestation dans un climat socio-politique difficile en décourageraient plus d'un. Néanmoins, envers et contre tout et malgré les menaces des enahdistes, certains sont venus représenter tous ces tunisiens qui souhaitent une Tunisie libre comme jamais.
A l'heure où l'on vous parle, le mensonge selon lequel cette manifestation, prévue depuis un mois, aurait lieu en réponse au scandale généré quasiment la veille par les aveux de l'ex-ministre de l'intérieur Farhat Rajhi, s'est fait entendre à la radio tunisienne. Quant aux partisans de Ennahdha, que l'on craignait aujourd'hui, ils se sont organisés sur le net pour que l'on croit à une manifestation de partisans du RCD. Ironie du sort, des manifestants ont pensé à faire des pancartes proclamant clairement leur haine contre ce parti de l'ex-dictateur Ben Ali qu'est le RCD.
La manifestation se déroule pour le moment sans heurts. Ils s'étaient préparés à une marche pacifiste, les organisateurs n'ont eu de cesse de le répéter dans les réseaux  en ligne.
Tout se passe comme prévu, à un détail près : les médias sont absents. Les locaux des agences de presse tunisiennes se situent pourtant dans les environs de l'avenue Mohamed V, à quelques pas du lieu de protestation. Dans la foule on se demande et on répète: où sont les journalistes? Cette grande absence révèle un constat d'échec mordant: les médias tunisiens sont encore à la botte du pouvoir provisoire en place. Il s'agit là de la grande déception des révolutionnaires tunisiens: toujours pas de liberté d'expression digne de ce nom. Les journalistes ne témoigneront pas de toute la suite de la Révolution de Jasmin, ces faits importants, des faits tels que cette lutte d'un grand nombre de jeunes tunisiens contre l'invasion du domaine du religieux dans le politique et vis-versa. Il va sans dire que la séparation des deux domaines représente une condition nécessaire pour créer une démocratie qui garantirait la liberté de culte.
Ces jeunes musulmans aujourd'hui rassemblés crient qu'ils veulent être de libres musulmans, qu'ils veulent pratiquer librement leur religion et qu'un parti qui mettrait en danger cette donne ne passera pas aux élections; Citoyennes et Citoyens Tunisiens, les entendrez-vous?
 


Slogans de la manifestation contre Ennahdha


Quelques-unes des pancartes brandies lors de la manifestation témoignent de messages clairs qui mettent la population en garde contre le parti islamique Ennahdha (= parti de la Renaissance et anciennement appelé Mouvement de la Tendance Islamique). Leurs slogans sont les suivants: "Je suis musulman, je suis tunisien, et je suis contre Ennahdha"; "Nous ne suivrons pas Monsieur Sayyid Qutb!"; "Ennahdha n'est pas à jour avec la réglementation sur les partis politiques"; et " Nous n'accepterons pas un 2ème RCD".
Des propos venant de manifestants et des organisateurs selon lesquels ces pancartes serviront à une prochaine manifestation viennent d'être recueillis à l'instant. En effet, les protestants se disent déçus du nombre de personnes qui ont eu le courage de venir manifester, les organisateurs déclarent que la prochaine manifestation sera organisée hors du centre-ville, à une heure plus tardive et dans un contexte moins offensif  pour permettre à davantage de tunisiens de se sentir en sécurité pour rejoindre le mouvement de mobilisation. Rappelons que la manifestation prévue depuis un mois a eu lieu au lendemain d'un scandale politique qui a remis le feu au poudre et ranimé la violence dans les rues du centre-ville de Tunis. Il s'agit des révélations faites par l'ex-ministre de l'intérieur du gouvernement provisoire, Farhat Rajhi, à la presse, au sujet de la stratégie politique de l'actuel gouvernement provisoire.

Pour plus d'informations sur les révélations faites par Farhat Rajhi : http://nadiafromtunis.blogspot.com/2011/05/farhat-rajhi-lhomme-par-qui-le-scandale.html